Les libertés et droits individuels doivent être protégés par les autorités tunisiennes qui doivent s’opposer à toute tentative de les compromettre pendant le mois de Ramadan
Nous, Collectif pour la défense des libertés individuelles,
Constatant les multiples atteintes et violations perpétrées contre les libertés individuelles par les autorités publiques, des groupes ou des individus autoproclamés protecteurs de la religion et des bonnes mœurs, ce qui a davantage multiplié et aggravé les atteintes contre les libertés individuelles dans un contexte d’impunité,
Constatant, comme les années précédentes et à l’approche du mois de Ramadan, la montée des discours de haine contre la diversité confessionnelle dans notre pays et l’augmentation des menaces contre les libertés de conscience, de religion, d’opinion et d’expression.
Compte tenu de la teneur fort inquiétante de la lettre adressée en novembre 2017 par le Ministre de l’Intérieur M. Lotfi Braham à l’Assemblée des Représentants du Peuple et qui circule actuellement sur les réseaux sociaux, invoquant le premier article de la Constitution, quelques dispositions constitutionnelles, la situation sécuritaire du pays, les menaces terroristes, et un déni total de la part du Ministère de l’intérieur quant aux excès commis au cours des dernières années (surtouts ceux relatifs à l’arrestation de non-jeuneurs) pour justifier la mise en vigueur du Décret 1981 et des restrictions exercées méthodiquement par le Ministère de l’Intérieur contre la liberté de conscience, de religion, d’expression, d’opinion et de commerce.
Face à cette lecture restreinte, sélective et conservatrice de la constitution, le Collectif pour la défense des libertés individuelles exprime sa plus vive préoccupation quant à la manière avec laquelle les autorités abordent le dossier des libertés individuelles et condamne ces positions qu’il considère être non seulement la raison mais aussi une couverture qui cache la propagation du discours de violence et de haine, et un moyen pour alimenter l’extrémisme et renforcer le terrorisme.
Pour ces raisons, le Collectif Civil Pour Les Libertés Individuelles adresse cette lettre aux autorités tunisiennes afin de leur rappeler leurs engagements nationaux et internationaux, en particulier ceux énoncés par la Constitution et le Pacte International Relatif Aux Droits Civils et Politiques, de leur demander de s’abstenir des violations commises contre les libertés individuelles quelles que soient les raisons, et l’appelle à faire cesser toutes les atteintes aux libertés individuelles en poursuivant et en punissant les agresseurs (individus ou groupes). Par conséquent :
Le Collectif Civil Pour Les Libertés Individuelles appelle le Président de la République à remplir son obligation constitutionnelle de « veiller au respect de la Constitution » (Article 72) comme une unité cohérente selon l’article 146.
Le Collectif Civil Pour Les Libertés Individuelles demande également au Chef du Gouvernement, constitutionnellement chargé de « déterminer la politique générale de l’État et de veiller à sa mise en œuvre », d’abroger les circulaires qui violent de façon flagrante les dispositions du texte suprême de l’Etat, en particulier la circulaire publiée en 1981 qui prévoit la fermeture des commerces pendant le mois de Ramadan, et d’une manière générale, l’appelle à mettre en œuvre les dispositions de la Constitution relatives aux droits et aux libertés.
Le Collectif Civil appelle également l’Assemblée des Représentants du Peuple à assumer ses responsabilités concernant la révision des lois répressives, y compris, le Code Pénal afin de l’adapter à la nouvelle Constitution, en matière de garantie des droits et des libertés individuelles et collectives.
Le Collectif Civil Pour Les Libertés Individuelles rappelle le pouvoir judiciaire de son obligation constitutionnelle de « protection des droits et des libertés de toute atteinte » (Article 49 de la Constitution), et de « garantir la suprématie de la Constitution, la souveraineté de la loi et la protection des droits et libertés » (Article 102 de la Constitution), et l’invite à abandonner toute poursuite judiciaire arbitraire en contradiction avec la Constitution.
Le Collectif Civil Pour Les Libertés Individuelles rappelle qu’il a déjà eu recours à la justice dans une première phase afin de protéger ces droits et libertés et en vue de rendre justice aux victimes de ces violations et arrestations arbitraires. Les composantes du Collectif se déclarent prêtes à militer en utilisant tous les moyens légaux pour faire respecter l’Etat de droit, de liberté de conscience et de croyance, d’égalité et de protection des libertés individuelles, l’état civil et démocratique consacré par la Constitution du 27 Janvier 2014.
Les associations signataires :
1. La Ligue tunisienne des droits de l’homme
2. L’Association Tunisienne des Femmes Démocrates
3. Association des Femmes Tunisiennes pour la Recherche sur le Développement
4. Association Tunisienne de défense des libertés individuelles (ADLI)
5. L’Association Beyti
6. L’initiative Mawjoudin pour l’égalité We Exist
7. La Ligue des Électrices Tunisiennes
8. Le Groupe Tawhida Ben Cheikh-Pour la Recherche & Action en santé des femmes
9. L’Association Shams
10. L’Association Tunisienne pour la Justice et Légalité DAMJ
11. L’Association CHOUF MINORITIES
12. L’Association pour la Promotion du Droit à la Différence ADD
13. La Ligue des Électrices Tunisiennes LET
14. L’Association Tunisienne de Lutte contre les MST et le SIDA ATL
15. L’Association Waai
16. Le réseau national des éducateur pairs Y-PEER Tunisie
17. L’Association CALAM
18. L’association Free Sight Association
19. ALSEJINE 52
20. L’Organisation Tunisienne de justice sociale et solidarité OTJUSS
21. L’Association Tunisienne de Prévention Positive+ ATP+
22. Le Réseau Doustouna
23. L’Association Horra
24. La Coalition pour Les Femmes de Tunisie
25. L’Association Fanni Roughman Anni
26. L’Association Mnemty
27. L’Association Touensa
28. L’Association L’ArtRue
29. L’Association Kelmty
30. Réseau EuroMed Droits
31. Avocats Sans Frontières (ASF)
Date:
Mardi, Mai 15, 2018